Rossel et RTL Belgium nous invitent à construire demain
Ce lundi 19 septembre, Rossel et RTL Belgium se sont réunis pour la première fois depuis l’acquisition de RTL Belgium par Rossel et DPG Media pour l’événement « Construire Demain ».
Entre les différent·es intervenant·es, CEO, journalistes, directeurs commerciaux et rédacteur·rices en chef, il a été question de synergies, de complémentarités entre les rédactions, et de la nécessité de faire face aux GAFAM dans le domaine de la publicité digitale.Le mot d’ordre qui était sur toutes les lèvres : proximité. Proximité avec l’audience, mais aussi avec les annonceurs (petits et grands).Les médias de demainLes interventions s’ouvrent sur une interview par Julie Denayer (journaliste chez RTL Belgium) de Bernard Marchant (CEO Rossel), qui souligne les raisons du partenariat avec DPG et RTL.
Au niveau du marché publicitaire, créer un acteur structurant nord/sud permettra de contrecarrer l’attraction du marché publicitaire vers l’étranger. Au niveau du marché consommateur, il y a plus d’intérêt à créer des synergies avec le nord du pays en raison des particularités belges qui nous sont communes.Le digital est le plus grand défi. Si le secteur semble dominé par les GAFAM, ils n’investissent pas tous les domaines. Tandis que Facebook et Google sont spécialisés dans les réseaux sociaux et l’agrégation de contenus, les médias de RTL et Rossel produisent du contenu.
Le digital pose également la question du financement. Subsister uniquement grâce de la publicité afin de conserver la gratuité n’est pas une option viable. À terme RTL pourrait donc se diriger vers un modèle SVOD, en plus du modèle AVOD. Le mot d’ordre est au local et à la proximité : « On aime bien parler de circuit court quand on parle d’alimentaire, mais la pub, c’est la même chose. Quand on investit sur les médias locaux, 90% des montant investis en publicité sont réinvestis dans l’économie locale », explique Bernard Marchant. « Notre ADN chez Rossel, c’est le travail dans la proximité. On veut fertiliser le local. Nous ne sommes pas dans une approche mono-marque mais multi-marques. On estime que pour toucher le consommateur, le lecteur, l’auditeur il vaut mieux le faire avec des marques qui ont des valeurs qui le touchent de manières différentes. »
Et Bernard Marchant de conclure avec un sourire : « En exploitant les différents formats, on va essayer d’utiliser le temps disponible des Belges francophones de façon que les GAFAM disparaissent de notre territoire. »
La proximité de demain
Les hérauts de la proximité sont Guillaume Collard (CEO RTL Belgium) et Olivier De Raeymaeker (CEO Le Soir).
Pour Guillaume Collard, la proximité est la clé du succès RTL.
Cela passe par des contenus locaux forts, que ce soit dans la réactivité face à des grands événements – RTL était le premier à interrompre ses programmes à la mort de la Reine Elizabeth II – ou dans des productions centrées sur notre histoire, comme La tragédie du Heysel. Olivier De Raeymaeker ajoute : « Le projet rédactionnel de Sudinfo est d’être au plus proche des communautés. Le Soir a un positionnement tout à fait différent, plutôt national, politique, est aussi très proche de son lectorat. »
Cette volonté se traduit dans le changement de slogan du journal en 2019 : Repensons notre quotidien. « ‘Notre’ traduit la volonté de mettre le lecteur au centre du projet. ‘Repensons’ est le projet rédactionnel du Soir, c’est-à-dire un journalisme qui se veut plus d’investigation, de prospection, d’anticipation, de solution. ‘Quotidien’, en plus d’être un jeu de mot pour le journal, se réfère à la vie quotidienne des gens. »
Pour Olivier De Raeymaeker, digital et proximité font bon ménage : « C’est le contenu qui compte. Le support papier ou digital n’est là que pour apporter l’information. » Le digital a permis au Soir de faire croître son nombre d’abonnés, et permet plus de proximité en termes de recommandations de contenus pour les lecteurs, et de ciblage grâce à la data pour les annonceurs.
Quant à Guillaume Collard, son projet pour RTL est ambitieux : « Je suis très mauvais perdant. Cela veut dire que j’ai l’ambition d’être la première plateforme de streaming en Belgique francophone. » Il prévoit de quadrupler, voire quintupler le budget communication de RTL Play.Tous deux insistent sur un maintien des marques et de leurs identités : « Nos marques complémentaires dans leur ADN, dans leurs contenus et dans leur supports. Ça nous permet, au travers de ces différents contenus et supports, de toucher une même personne différentes fois au cours de la journée à des moments très pertinents. » Une fusion ne représente aucun intérêt, et serait « contre la vision que nous avons de la pluralité ».
L’info de demain
Le panel éditorial est lancé par un commentaire de Laurent Haulotte (Directeur de l’Information et des Sports de RTL Belgium) : « Le journalisme, ce n’est pas un algorithme qui vous prend pour un idiot qui voudrait toujours voir les mêmes contenus ou qui vous conforterait dans vos opinions. »Demetrio Scagliola (Rédacteur en chef de Sudinfo et 7 Dimanche) continue : « La déontologie, c’est d’abord le respect de son lecteur. C’est le respect de la personne qui vous lit. C’est parfois le respect de la personne dont on va parler. » Loin de la violence des réseaux sociaux, cette notion de respect est le propre du journaliste. Il ajoute : « La proximité chez Sudinfo, c’est comme la terre battue pour Rafael Nadal. » Pour lui, la proximité est tout sauf un frein à la déontologie, car elle met les journalistes au contact des gens.Béatrice Delvaux (Éditorialiste en chef du Soir) ajoute que les rédactions utilisent elles aussi les réseaux sociaux pour diffuser leurs contenus, « mais nous avons aussi de l’indépendance, et c’est ce qui nous permet d’exercer les autres qualités » telles que le respect déontologique et esprit critique.
À l’inverse de la France, la Belgique a la chance de posséder des groupes de presse qui sont uniquement concentrés sur l’activité de l’information – sans conflit d’intérêts avec des actionnaires qui ont leurs mains dans d’autres commerces. « Un journaliste ne peut avoir qu’une seule loyauté, et cette loyauté unique fait savoir que nous servons le lecteur. »Ici aussi, la fusion des rédactions est impensable. « Si on ne fait qu’une seule rédaction, on fait le même projet », explique simplement Béatrice Delvaux. La force du rachat permet cependant de concentrer les moyens d’investissements, la force du marketing, le recrutement, ainsi que de conclure des partenariats internationaux forts. Chaque projet a ses singularités et contenus exclusifs.
Demetrio Scagliola ajoute « Il y a aussi des contenus que tout le monde traite, mais chacun les édite avec des angles qui sont taillés sur mesure. » L’entraide n’est pas exclue, mais jamais avec une perte d’identité.
La communication de demain
Interrogé par Thierry Hugot (Directeur Commercial et Marketing Rossel), Christian de La Villehuchet (Global Chief Integration Officer Havas Group) prend l’angle du commerce local, qui pour lui « a besoin d’une proximité incarnée par les produits et la marque, accompagnés par des partenaires médias ». Et la communication dans tout cela ? Ce n’est « que transcrire et vendre ce qui a été fait avant », le plus gros du travail est déjà fait en amont. Comparés aux GAFAM, les médias locaux auront « un contenu plus qualitatif, et possèdent une relevance culturelle », et c’est cela qui fait leur force.En termes de communication, le plus grand défi du digital est la puissance d’audience. En ce qui concerne le local, « si on veut targeter de petites zones géographiques, il faut être très puissant sur chaque zone ».
Dans cette course à la commercialisation d’espaces publicitaires, l’avantage des GAFAM est d’être « des machines de guerre technologiques qui ont su simplifier l’achat ». Afin de les concurrencer dans le digital, il faudrait donc « standardiser le marché afin de permettre au petit commerçant local d’acheter en 3 clics », explique Thierry Hugot.
La différence culturelle entre les États-Unis et l’Europe rend cependant les entreprises de fusion difficiles – comme on a pu le voir avec l’abandon de la fusion TF1-M6 ce vendredi 16 septembre. Selon Christian de La Villehuchet, « l’Europe a besoin de champions européens et à fortiori de champions locaux », insistant sur l’idée que la concurrence dans le digital ne prend pas place entre les acteurs locaux, mais bien « avec les GAFAM, qui pèsent 90% du marché digital ».
L’engagement de demain
Pierre Leerschool, Administrateur délégué du Groupe Sudmédia, vient clore la soirée en rappelant une dernière fois : « la proximité chez nous, bien sûr c’est l’information locale », mais c’est « surtout des informations qu’on ne retrouve pas dans d’autres médias, des histoires qui se passent dans des régions, qui sont particulières ». Cependant, la proximité, c’est plus que ça pour Pierre Leerschool : « C’est cette dynamique qu’on met en place. On vient vers nous pour nous demander de soutenir des initiatives commerciales, culturelles, politiques et économiques. »
Une dynamique créée par la force de frappe des journalistes – 130 salariés, 350 freelance – mais aussi par la force de marques historiques. Le mot de la fin est déclamé dans une belle imitation du bourgmestre de Liège qui affirme : « Si c’est La Meuse qui le dit, c’est que c’est vrai ! » «
source mediaspects 21.09.22″